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Leçons d'histoire

Constantin-François Volney

C.-F. Volney

Leçons d'histoire, / prononcées à l'École normale; en l'an III de la République Française; Histoire de Samuel, inventeur du sacre des rois; État physique de la Corse

AVERTISSEMENT DE L'AUTEUR

LES Leçons d'Histoire que je présente au public sont les mêmes qui, l'an 3, obtinrent son suffrage à l'École Normale[1 - Les professeurs de cette école, devenue célèbre en peu de mois, étaient:]: j'aurais désiré de les en rendre plus dignes par plus de corrections et de développements, mais j'ai éprouvé qu'un nouveau travail gâtait le mérite original de l'ancien, celui d'une composition du premier jet, en quelque sorte improvisée[2 - Le lecteur observera que les professeurs de l'École Normale s'étaient imposé la loi de faire leurs leçons sur de simples notes, à la manière des orateurs. Ces leçons, recueillies à l'instant par des écrivains aussi prompts que la parole, étaient légèrement révisées, et de suite envoyées à l'impression; mes trois premières sont dans ce cas, et je n'eus que 15 jours pour m'y préparer.]. D'ailleurs, dans nos circonstances, il s'agit moins de gloire littéraire, que d'utilité sociale; et dans le sujet présent, cette utilité est plus grande, qu'elle ne le semble au premier coup d'œil: depuis que j'y ai attaché mes idées, plus j'ai analysé l'influence journalière qu'exerce l'Histoire sur les actions et les opinions des hommes, plus je me suis convaincu qu'elle était l'une des sources les plus fécondes de leurs préjugés et de leurs erreurs. C'est de l'Histoire que dérive la presque totalité des opinions religieuses, et en accordant à l'orgueil de chaque secte d'excepter les siennes, il n'en est pas moins évident que, là où la religion est fausse, l'immense quantité d'actions et de jugements dont elle est la base, porte aussi à faux et croule avec elle. C'est encore de l'Histoire que dérivent la plupart des maximes et des principes politiques qui dirigent les gouvernements, les renversent ou les consolident; et l'on sent quelle sphère d'actes civils et d'opinions embrasse dans une nation ce second mobile. Enfin ce sont les récits que nous entendons chaque jour, et qui sont une branche réelle de l'Histoire, qui deviennent la cause plus ou moins médiate d'une foule d'idées et de démarches erronées; de manière que, si l'on soumettait au calcul les erreurs des hommes, j'oserais assurer que sur mille articles, neuf cent quatre-vingts appartiennent à l'Histoire; et je poserais volontiers en principe que ce que chaque homme possède de préjugés et d'idées fausses, vient d'autrui, par la crédule confiance accordée aux récits; tandis que ce qu'il possède de vérités et d'idées exactes, vient de lui-même et de son expérience personnelle.

Je croirais donc avoir rendu un service Г©minent, si mon livre pouvait Г©branler le respect pour l'Histoire, passГ© en dogme dans le systГЁme d'Г©ducation de l'Europe; si, devenant l'avis prГ©liminaire, la prГ©face universelle de toutes les histoires, il prГ©munissait chaque lecteur contre l'empirisme des Г©crivains, et contre ses propres illusions; s'il engageait tout homme pensant Г  soumettre tout homme raconteur Г  un interrogatoire sГ©vГЁre sur ses moyens d'information, et sur la source premiГЁre des ouГЇ-dire; s'il habituait chacun Г  se rendre compte de ses motifs de croyance, Г  se demander:

1Вє Si, lorsque nous avons tant d'insouciance habituelle Г  vГ©rifier les faits; si, lorsque l'entreprenant, nous y trouvons tant de difficultГ©s, il est raisonnable d'exiger d'autrui plus de diligence et de succГЁs que de nous-mГЄmes;

2Вє Si, lorsque nous avons des notions si imparfaites ou si fausses de ce qui se passe sous nos yeux, nous pouvons espГ©rer d'ГЄtre mieux instruits de ce qui se passe ou s'est passГ© Г  de grandes distances de lieux ou de temps;

3Вє Si, lorsque nous avons plus d'un exemple prГ©sent de faits Г©quivoques ou faux, envoyГ©s Г  la postГ©ritГ© avec tous les passe-ports de la vГ©ritГ©, nous pouvons espГ©rer que les ho