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Souvenirs d'Г©gotisme

Stendhal

Stendhal

Souvenirs d'Г©gotisme autobiographie et lettres inГ©dites publiГ©es par Casimir Stryienski

AVANT-PROPOS

Le manuscrit autographe des Souvenirs d’Égotisme se trouve à la Bibliothèque de Grenoble. Ces pages complètent les Mémoires de Stendhal, qui forment ainsi trois volumes: Vie de Henri Brulard (1788-1800) – Journal (1801-1814) – Souvenirs d’Égotisme (1821-1830) —et représentent tout ce que Beyle a laissé de documents autobiographiques.

Les Lettres inédites sont empruntées à diverses collections; j’adresse mes remercîments à MM. P. – A. Cheramy, Ed. Maignien, conservateur de la Bibliothèque de Grenoble, Charles de Spoelberch de Lovenjoul, Auguste Cordier, Henri Cordier, F. Corréard et Julien Lemer, qui ont bien voulu me permettre de réunir cette précieuse correspondance.

STENDHAL ET LES SALONS DE LA RESTAURATION

I

Henri Beyle fut un homme d’esprit – c’est en somme le plus clair de sa réputation auprès des gens qui, de son œuvre si variée, si neuve, si personnelle n’ont rien lu. Trouver la preuve de cette affirmation dans les livres de Stendhal ne serait pas difficile – on pourrait ouvrir, presque au hasard, l’un ou l’autre des volumes qu’il publia de 1814 à 1839 et on lirait ces jolis mots à l’allure paradoxale ou ironique, ces aperçus fins et profonds, ces traits suggestifs qui sont comme l’écho des conversations de ce brillant causeur. Mais on ne se donne pas tant de peine – on croit sur parole la renommée et l’on déclare, après tant d’autres, que Beyle fut un homme d’esprit – la phrase est toute faite et très commode, et se répètera encore longtemps.

Aussi bien serait-il peut-être à propos – avant de placer l’auteur de Rouge et Noir dans le milieu intellectuel et littéraire où, vers la quarantième année, il conquit ce titre, – de citer quelques unes des formules qui sont la marque de son individualité.

Nous connaîtrons ainsi Stendhal plus intimement, – ce sera un moyen de nous intéresser davantage a ses succès mondains.

Son esprit a bien des faces et se manifeste très diversement. Le mot, chez lui, est souvent sarcastique, souvent aussi plus doux, – mélancolique et rêveur. Beyle est tout à la fois le disciple de l’utilitaire Helvétius, du tendre Cabanis, du sec Duclos, et peut-être, – inconsciemment – de ce gentilhomme lettré, le prince de Ligne, cet autre homme d’esprit qui, avant Stendhal, avait tenté une classification des différentes phases de la passion amoureuse.

Les préfaces de Beyle surtout sont pleines de ces façons ingénieuses et satiriques au moyen desquelles il laisse entrevoir sa pensée plutôt qu’il ne l’exprime – et notons que c’est le caractère de son esprit et que cette discrétion dans la forme, sinon dans l’intention, en fait tout le charme.

A-t-il, par exemple, à dire comment il comprend l’amour? Il ne donnera pas une définition, mais il débitera sans emphase, sans élever la voix, ce brillant couplet: «Rougir tout à coup, lorsqu’on vient à songer à certaines actions de sa jeunesse; avoir fait des sottises par tendresse d’âme et s’en affliger, non pas parce qu’on fut ridicule aux yeux du salon, mais bien aux yeux d’une certaine personne dans ce salon; à vingt-six ans être amoureux de bonne foi d’une femme qui en aime un autre, ou bien encore (mais la chose est si rare qu’on ose à peine l’écrire, de peur de retomber dans les inintelligibles…) ou bien encore, en entrant dans le salon où est la femme que l’on croit aimer, ne songer qu’à lire dans ses yeux ce qu’elle pense de nous en cet instant, et n’avoir nulle idée de mettre l’amour dans nos propres regards: voilà les antécédents que je demanderai à mon lecteur. C’est la description de beaucoup de ces sentiments fins et rares qui a semblé obscure aux hommes à idées positives. Comment faire pour être clair à leurs yeux? Leur annoncer une hausse de cinquante