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Les Quarante-Cinq — Tome 3

Alexandre Dumas

Alexandre Dumas

Les Quarante-Cinq — Tome 3

XLIV

PRÉPARATIFS DE BATAILLE

Le camp du nouveau duc de Brabant Г©tait assis sur les deux rives de l'Escaut: l'armГ©e, bien disciplinГ©e, Г©tait cependant agitГ©e d'un esprit d'agitation facile Г  comprendre.

En effet, beaucoup de calvinistes assistaient le duc d'Anjou, non point par sympathie pour le susdit duc, mais pour ГЄtre aussi dГ©sagrГ©ables que possible Г  l'Espagne, et aux catholiques de France et d'Angleterre; ils se battaient donc plutГґt par amour-propre que par conviction ou par dГ©voГ»ment, et l'on sentait bien que la campagne une fois finie, ils abandonneraient le chef ou lui imposeraient des conditions.

D'ailleurs ces conditions, le duc d'Anjou laissait toujours croire qu'à l'heure venue, il irait au devant d'elles. Son mot favori était: « Henri de Navarre s'est bien fait catholique, pourquoi François de France ne se ferait-il pas huguenot? »

De l'autre cГґtГ©, au contraire, c'est-Г -dire chez l'ennemi, existaient, en opposition avec ces dissidences morales et politiques, des principes distincts, une cause parfaitement arrГЄtГ©e, le tout parfaitement pur d'ambition ou de colГЁre.

Anvers avait d'abord eu l'intention de se donner, mais à ses conditions et à son heure; elle ne refusait pas précisément François, mais elle se réservait d'attendre, forte par son assiette, par le courage et l'expérience belliqueuse de ses habitants; elle savait d'ailleurs qu'en étendant le bras, outre le duc de Guise en observation dans la Lorraine, elle trouvait Alexandre Farnèse dans le Luxembourg. Pourquoi, en cas d'urgence, n'accepterait-elle pas les secours de l'Espagne contre Anjou, comme elle avait accepté le secours d'Anjou contre l'Espagne?

Quitte, aprГЁs cela, Г  repousser l'Espagne aprГЁs que l'Espagne l'aurait aidГ©e Г  repousser Anjou.

Ces rГ©publicains monotones avaient pour eux la force d'airain du bon sens.

Tout Г  coup ils virent apparaГ®tre une flotte Г  l'embouchure de l'Escaut, et ils apprirent que cette flotte arrivait avec le grand amiral de France, et que ce grand amiral de France amenait un secours Г  leur ennemi.

Depuis qu'il Г©tait venu mettre le siГЁge devant Anvers, le duc d'Anjou Г©tait devenu naturellement l'ennemi des Anversois.

En apercevant cette flotte, et en apprenant l'arrivГ©e de Joyeuse, les calvinistes du duc d'Anjou firent une grimace presque Г©gale Г  celle que faisaient les Flamands. Les calvinistes Г©taient fort braves, mais en mГЄme temps fort jaloux; ils passaient facilement sur les questions d'argent, mais n'aimaient point qu'on vГ®nt rogner leurs lauriers, surtout avec des Г©pГ©es qui avaient servi Г  saigner tant de huguenots au jour de la Saint- BarthГ©lemy.

De lГ , force querelles qui commencГЁrent le soir mГЄme de l'arrivГ©e de Joyeuse, et se continuГЁrent triomphalement le lendemain et le surlendemain.

Du haut de leurs remparts, les Anversois avaient chaque jour le spectacle de dix ou douze duels entre catholiques et huguenots. Les polders servaient de champ clos, et l'on jetait dans le fleuve beaucoup plus de morts qu'une affaire en rase campagne n'en eût coûté aux Français. Si le siège d'Anvers, comme celui de Troie, eût duré neuf ans, les assiégés n'eussent eu besoin de rien faire autre chose que de regarder faire les assiégeants; ceux-ci se fussent certainement détruits eux-mêmes.

François faisait, dans toutes ces querelles, l'office de médiateur, mais non sans d'énormes difficultés; il y avait des engagements pris avec les huguenots français: blesser ceux-ci, c'était se retirer l'appui moral des huguenots flamands, qui pouvaient l'aider dans Anvers.

D'un autre cГґtГ©, brusquer les catholiques envoyГ©s par le roi pour se faire tuer Г  son service, Г©tait pour le duc d'Anjou chose non-seulement impolitique, mais encore compromettante.

L'arrivГ©e de ce renfort, sur lequel le duc d'Anjou lui-mГЄme ne comptait pas, avait bouleversГ© les Espagnols, et de leur cГґtГ© les Lorrains en crevaient de fureur.

C'Г©tait bien quelque chose pour l