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TroГЇlus et Cressida

Уильям Шекспир

William Shakespeare

TroГЇlus et Cressida

NOTICE SUR TROГЏLUS ET CRESSIDA

Si, dans TroГЇlus et Cressida, le poГ«te traite un peu lestement les hГ©ros de l'Iliade, si ces grands noms lui ont si peu imposГ© qu'il est douteux que cette composition dramatique ne soit pas une parodie, ne croyons pas que Shakspeare ait blasphГ©mГ© contre la divinitГ© d'HomГЁre; rappelons-nous que nos anciens romanciers avaient fait des demi-dieux et des hГ©ros de l'antiquitГ© de vГ©ritables chevaliers errants, et qu'Hercule, ThГ©sГ©e, Jason, Achille, conservaient, pendant dix gros volumes, les mГЄmes moeurs que les Lancelot, les Roland, les Olivier, et d'autres paladins chrГ©tiens.

C'est Г  Chaucer que Shakspeare nous semble en grande partie redevable de l'idГ©e de TroГЇlus et Cressida; mais les grands traits avec lesquels il dessine les caractГЁres de ses autres hГ©ros, Hector, Achille, Ajax, DiomГЁde, Agamemnon, Nestor, le lГўche et satirique Thersite, l'amitiГ© d'Achille et de Patrocle, l'Г©loquence d'Ulysse, que la Minerve d'HomГЁre n'eГ»t pas si bien inspirГ©; enfin, quelques traits historiques qu'on ne trouve ni dans Chaucer, ni dans Caxton, ni dans aucun des romanciers du moyen Гўge, font conjecturer que Shakspeare aurait bien pu connaГ®tre par la traduction quelques livres de l'Iliade.

Quoi qu'il en soit, jamais Shakspeare ne s'est moins occupé de l'effet théâtral que dans cette pièce. Nous passons en revue avec lui tous ces héros, que nos souvenirs classiques nous rendent sacrés, sans pouvoir résister à la tentation de les trouver parfois ridicules, et cependant naturels.

Hector, qui paraГ®t d'abord digne de concentrer sur lui tout l'intГ©rГЄt, parce qu'il est reprГ©sentГ© comme le plus aimable, nous surprend tout Г  coup en refusant de se battre avec Ajax, parce qu'il est son cousin. On ne pardonnerait point Г  Shakspeare cette excuse, s'il ne faisait en quelque sorte rГ©paration d'honneur Г  ce hГ©ros en le faisant pГ©rir d'une mort sublime.

Ajax est un des caractГЁres les plus originaux de la piГЁce, et s'accorde assez bien avec celui de l'Iliade. Il forme avec Achille un contraste habilement mГ©nagГ©. On trouverait encore de nos jours Г  faire l'application de son portrait tel que l'esquisse Alexandre.

Achille est bien aussi l'Achille de l'Iliade; mais il se dГ©shonore en excitant les bouffonneries de Patrocle et la mГ©chancetГ© de Thersite; et il y a quelque chose de rГ©voltant dans la froide fГ©rocitГ© avec laquelle il Г©gorge Hector.

Le vieux roi de Pylos ne paraГ®t que pour nous montrer sa barbe blanche et recevoir les compliments d'Ulysse. Celui-ci possГЁde Г  lui seul l'Г©loquence et la raison de la piГЁce; mais il faut bien que ses discours soient sublimes, car il ne fait que des discours. Les autres hГ©ros de Troie et du camp des Grecs jouent un rГґle encore moins important, et pour la prise de Troie, et pour l'intrigue des deux amants.

TroГЇlus lui-mГЄme a pour caractГЁre de n'en point avoir. Sa patience nous fait sourire; on a peine Г  croire Г  ses emportements qui, du reste, comme l'observe Schlegel, ne font mal Г  personne. Mais les caractГЁres de Cressida et de Pandarus sont frappants de vГ©ritГ© et d'originalitГ©; le nom de celui-ci est devenu dans la langue anglaise un mot honnГЄte pour exprimer un mГ©tier qui ne l'est guГЁre, et qui n'a point d'Г©quivalent dans la nГґtre; car le Bonneau de la Pucelle de Voltaire n'est pas encore proverbial parmi nous.

Cressida nous amuse par son Г©tourderie; elle devient amoureuse de TroГЇlus par dГ©soeuvrement, et le quitte par pure lГ©gГЁretГ©. Sa passion pour DiomГЁde n'est pas plus sГ©rieuse que la premiГЁre; un troisiГЁme galant n'aurait qu'Г  s'offrir pour le supplanter aussi facilement que l'a Г©tГ© TroГЇlus.

On peut lui appliquer le vers de lord Byron:

Thou art not false, but thou art fickle.

Tu n'es point perfide, tu n'es que lГ©gГЁre.

Si cette pièce n'est pas une des plus morales et des plus fortement conçues de Shakspeare, elle n'est pas une des m