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NapolГ©on Le Petit

Виктор Мари Гюго

Victor Hugo

NapolГ©on Le Petit

LIVRE PREMIER

L'HOMME

I

LE 20 DÉCEMBRE 1848

Le jeudi 20 dГ©cembre 1848, l'assemblГ©e constituante, entourГ©e en ce moment-lГ  d'un imposant dГ©ploiement de troupes, Г©tant en sГ©ance, Г  la suite d'un rapport du reprГ©sentant Waldeck-Rousseau, fait au nom de la commission chargГ©e de dГ©pouiller le scrutin pour l'Г©lection Г  la prГ©sidence de la rГ©publique, rapport oГ№ l'on avait remarquГ© cette phrase qui en rГ©sumait toute la pensГ©e: В«C'est le sceau de son inviolable puissance que la nation, par cette admirable exГ©cution donnГ©e Г  la loi fondamentale, pose elle-mГЄme sur la constitution pour la rendre sainte et inviolableВ»; au milieu du profond silence des neuf cents constituants rГ©unis en foule et presque au complet, le prГ©sident de l'assemblГ©e nationale constituante, Armand Marrast, se leva et dit:

«Au nom du peuple français,

В«Attendu que le citoyen Charles-Louis-NapolГ©on Bonaparte, nГ© Г  Paris, remplit les conditions d'Г©ligibilitГ© prescrites par l'article 44 de la constitution;

В«Attendu que, dans le scrutin ouvert sur toute l'Г©tendue du territoire de la rГ©publique pour l'Г©lection du prГ©sident, il a rГ©uni la majoritГ© absolue des suffrages;

В«En vertu des articles 47 et 48 de la constitution, l'assemblГ©e nationale le proclame prГ©sident de la rГ©publique depuis le prГ©sent jour jusqu'au deuxiГЁme dimanche de mai 1852.В»

Un mouvement se fit sur les bancs et dans les tribunes pleines de peuple; le prГ©sident de l'assemblГ©e constituante ajouta:

В«Aux termes du dГ©cret, j'invite le citoyen prГ©sident de la rГ©publique Г  vouloir bien se transporter Г  la tribune pour y prГЄter serment.В»

Les reprГ©sentants qui encombraient le couloir de droite remontГЁrent Г  leurs places et laissГЁrent le passage libre. Il Г©tait environ quatre heures du soir, la nuit tombait, l'immense salle de l'assemblГ©e Г©tait plongГ©e Г  demi dans l'ombre, les lustres descendaient des plafonds, et les huissiers venaient d'apporter les lampes sur la tribune. Le prГ©sident fit un signe et la porte de droite s'ouvrit.

On vit alors entrer dans la salle et monter rapidement Г  la tribune un homme jeune encore, vГЄtu de noir, ayant sur l'habit la plaque et le grand cordon de la lГ©gion d'honneur.

Toutes les tГЄtes se tournГЁrent vers cet homme. Un visage blГЄme dont les lampes Г  abat-jour faisaient saillir les angles osseux et amaigris, un nez gros et long, des moustaches, une mГЁche frisГ©e sur un front Г©troit, l'oeil petit et sans clartГ©, l'attitude timide et inquiГЁte, nulle ressemblance avec l'empereur; c'Г©tait le citoyen Charles-Louis-NapolГ©on Bonaparte.

Pendant l'espГЁce de rumeur qui suivit son entrГ©e, il resta quelques instants la main droite dans son habit boutonnГ©, debout et immobile sur la tribune dont le frontispice portait cette date: 22, 23, 24 fГ©vrier, et au-dessus de laquelle on lisait ces trois mots: LibertГ©, Г‰galitГ©, FraternitГ©.

Avant d'ГЄtre Г©lu prГ©sident de la rГ©publique, Charles-Louis-NapolГ©on Bonaparte Г©tait reprГ©sentant du peuple. Il siГ©geait dans l'assemblГ©e depuis plusieurs mois, et, quoiqu'il assistГўt rarement Г  des sГ©ances entiГЁres, on l'avait vu assez souvent s'asseoir Г  la place qu'il avait choisie sur les bancs supГ©rieurs de la gauche, dans la cinquiГЁme travГ©e, dans cette zone communГ©ment appelГ©e la Montagne, derriГЁre son ancien prГ©cepteur, le reprГ©sentant Vieillard. Cet homme n'Г©tait pas une nouvelle figure pour l'assemblГ©e, son entrГ©e y produisit pourtant une Г©motion profonde. C'est que pour tous, pour ses amis comme pour ses adversaires, c'Г©tait l'avenir qui entrait, un avenir inconnu. Dans l'espГЁce d'immense murmure qui se formait de la parole de tous, son nom courait mГЄlГ© aux apprГ©ciations les plus diverses. Ses antagonistes racontaient ses aventures, ses coups de main, Strasbourg, Boulogne, l'aigle apprivoisГ© et le morceau de viande dans le petit chapeau. Ses amis allГ©guaient son exil, sa p