Назад к книге «Le Pèlerin amoureux» [Уильям Шекспир]

Le PГЁlerin amoureux

Уильям Шекспир

William Shakespeare

Le PГЁlerin amoureux

POГ‹ME

I. – La céleste rhétorique de tes yeux, contre lesquels le monde ne pourrait se défendre, n'a-t-elle pas invité mon coeur à ce lâche parjure? Des voeux rompus à cause de toi ne méritent pas un châtiment. J'ai manqué à mes engagements envers une femme, mais je prouverai que je n'ai pas manqué à mes engagements envers toi, parce que tu es une déesse; mon serment était terrestre, tu es un amour céleste; ta grâce, une fois que je la possède, guérit chez moi tous les torts. Mon serment n'était qu'un souffle, un souffle est une vapeur, ainsi donc, beau soleil, toi qui brilles sur cette terre, dissipe ce serment vaporeux, il est en ton pouvoir; si je manque, ce ne sera donc plus ma faute. Si je manque, quel fou ne serait assez sage pour perdre son serment afin de gagner un paradis?

II. – La douce Cythérée, assise près d'un ruisseau avec le jeune Adonis charmant, pur et frais, fit la cour à cet enfant par des regards séduisants, des regards comme la reine de la beauté peut seule en lancer. Elle lui racontait des histoires pour enchanter ses oreilles; elle lui accordait des faveurs pour gagner ses yeux; pour amollir son coeur elle le touchait de la main, et cette main légère sait triompher de la chasteté; mais soit que sa grande jeunesse ne comprît pas ce qu'elle voulait, ou qu'il refusât d'accepter ce qu'elle lui offrait, l'aimable proie ne voulut pas mordre à l'hameçon, et souriait et plaisantait à chacune de ses offres gracieuses; alors la belle reine tomba par terre sur le dos; il était près d'elle, il se leva et s'enfuit, ô fou insensé!

III. – Si l'amour me rend parjure, comment pourrai-je prêter serment à l'amour? jamais foi n'a été gardée lorsqu'elle n'était pas jurée à la beauté; je suis parjure envers moi-même, mais je le resterai fidèle; les pensées qui sont pour moi comme des chênes se pliaient devant toi comme de l'osier. L'étude abandonne ses goûts et prend tes yeux pour levier, tous les plaisirs que l'on peut imaginer y éclatent. S'il s'agit de connaissances, il suffit de te connaître; la langue qui sait te louer est assez savante; l'esprit qui te voit sans admiration n'est qu'ignorance, et c'est quelque honneur pour moi que d'admirer tes facultés. Ton oeil me semble lancer les éclairs de Jupiter; son redoutable tonnerre est dans ta voix, qui est toute musicale et d'une douce ardeur lorsqu'elle n'est pas animée par la colère. Céleste comme tu l'es, oh! ne sois pas indignée d'entendre chanter les louanges des cieux d'une voix si humaine.

IV. – A peine le soleil avait-il séché l'herbe couverte de rosée, à peine les troupeaux s'étaient-ils abrités sous les haies, que Cythérée tout éperdue d'amour, vint impatiemment attendre Adonis sous un saule croissant au bord d'un ruisseau, ruisseau où Adonis avait coutume de se rafraîchir. Le temps était chaud, mais elle était plus ardente encore en attendant l'approche de celui qui était souvent venu en ce lieu. Il arrive enfin et jetant son manteau, il se trouve nu sur la rive verdoyante du ruisseau; le soleil contemplait le monde d'un oeil éclatant mais moins ardent que celui de la reine; lui, l'apercevant, s'élance dans l'eau, et s'y arrête. O Jupiter, s'écrie-t-elle, pourquoi ne suis-je pas un ruisseau!

V. – Celle que j'aime est belle, mais elle n'est pas si belle qu'inconstante; elle est douce comme une colombe, mais elle n'est ni sûre ni fidèle; elle est plus transparente que le verre, mais tout aussi fragile que le verre; elle est plus molle que la cire, mais elle est rouillée comme le fer; c'est un pâle lis avec une nuance de pourpre pour l'embellir; nulle n'est plus belle, nulle n'est plus perfide qu'elle.

Combien de fois ses lГЁvres ne se sont-elles pas collГ©es aux miennes, profГ©rant entre chaque baiser des serments d'amour et de fidГ©litГ©! Combien de contes a-t-elle faits pour me plaire, redoutant mon amour et craignant de le perdre! Ce